Pierre Bujeau

Le cycle de concerts Hertz est un projet d'étude dans lequel l'expérimentation n'est pas musicale, mais environnante à la musique, cette dernière devant être pour moi expérientielle [terme de Sébastien Biset]. Un des objectifs de cette recherche est la prévision d'un état psychique et physique de l'individu spectateur lors de l'évènement sonore pour l'amener à une concentration nécessaire à l'écoute. Mon étude du phénomène sonore englobe sa production, sa présentation et sa réception par l'individu ; sa présence dans mon schéma de pensée est la seule résurgence du design dans ma production. Par l'investissement d'espaces jugés inaccessibles, [souterrains, hall du bâtiment H...] et par une absence volontairement cruelle de communication, un public alerte s'est constitué au sein de l'école pour venir à ces rares concerts [7 en deux ans] réunissant dans cette communauté de plus en plus d'individus à observer, déboussoler, ou rassurer.En invitant cet ensemble d'individus dans des situations inédites, j'ai pu étudier ses moindres réactions face à une remise en question du concert par renversement des codes spatiaux ou sonores [entrée dos au musicien ou source sonore dans le dos public, obscurité totale, stroboscopes...].

L'intérêt de l'évènement se construit sur la proximité ou la distance entre l'intention et l'avis postérieur du public, mais en aucun cas le public n'est influencé verbalement sur la position qu'il doit avoir lors de l'écoute, je ritualisais uniquement et ironiquement un silence protocolaire : « Le concert va commencer, je vous demande un silence absolu. »Un objet éditorial fait acte de ces ré-flexions, en propose un témoignage. Cette recherche est intimement liée à ma pratique musicale, et nourrit ma position en tant que musicien sensible aux arts plastiques - ou réciproquement - cependant, je l'envisage aussi comme une objection à un environnement qui n'a que trop de distance avec cette possible transdisciplinarité.