Julie Digard

Élaborer des espaces de peinture, dont la construction se fait par la confrontation, et parfois la possible cohabitation d'éléments de natures différentes et se référençant à la peinture abstraite : forme, couleur, motif.

La convocation de ces éléments à priori disparates se déploie sur le mur, en intégrant l'idée de l'assemblage : confronter des couleurs, des formes, des motifs, parfois même des supports de nature différente. Cette réflexion autour de possibles espaces de peinture a donné lieu à deux séries différentes, exécutées l'une en parallèle de l'autre.

La première série intitulée « Les trois » qui est plus de l'ordre de la recherche et du geste spontané fait référence à l'atelier comme espace de travail et d'expérimentation. Une procédure a été mise en place : travailler dans l'atelier avec ce qui se trouve à portée de main : morceaux d'anciennes toiles, croûtes de peintures séchées, rubans adhésifs colorés, scotchs de masquage, clous, ficelles, ayant servi préalablement... Choisir dans ces éléments trois modules différents dont l'assemblage sur le mur pourrait donner naissance à un espace de peinture. Chaque espace se veut de petite taille, pour souligner la manipulation des différents éléments et leurs éventuelles fragilités.

La deuxième série, intitulée « Les cousus » se construit aussi sur l'idée d'un assemblage, mais qui se voudrait ici plus fixe et définitif. Un assemblage qui serait plus de l'ordre du collage. Ici, des morceaux de toiles sont peints, découpés et réassemblés par le biais de la couture. Le fil sert de lien définitif. Ce lien qui est invisible est cependant présent. Le contour final de l'espace de peinture est non identifiable. Ni rectangulaire, ni triangulaire, ni même ovale, la forme finale doit elle aussi suivre un ensemble de confrontations. Lignes droites, courbes et arrêts brusques délimitent l'espace de peinture sur le mur. « Les cousus » sont comme des mues colorées, des mues fines qui font corps avec l'espace mural rappelant la planéité de la peinture, planéité pourtant évoquée non de manière totale. En effet, certaines parties des espaces de peinture sont en volume, et s'éloignent ainsi du mur, comme pour tendre vers un ailleurs.