Dans
une immersion dans le domaine de la pêche, sous la forme d’enquête de terrain,
je me suis initié à la fabrication de mouches artificielles, à
l’accessoirisation de leurres de pêche que j’apprends à utiliser. En effet,
quand on pêche au leurre, il s’agit, pour piéger le poisson, de le tromper, de
le mystifier. Celui qui fabrique les leurres doit connaître le comportement du
poisson, s’adapter à lui, pour viser la ressemblance avec ses proies
habituelles. Il utilise à la fois un savoir, une expérience et un savoir-faire.
Je manipule et utilise, comme un pêcheur, des leurres afin d’obtenir une forme
artificielle aux capacités de simuler les attributs du poisson ainsi que ses
mouvements dans l’eau. Je me rapproche des savoir-faire des ateliers Palissy et
de la pratique du moule sur nature. Dans un travail d’émaillage, c’est le
travail de maquettiste qui se rapproche de peintures contemporaines, par
l’usage d’aérographe, de pochoir, mes gestes font leurs emprunts de techniques
similaires entre différentes cultures. Ces objets que je fabrique se situent au
rang de la sculpture, de la peinture et du petit objet fabriqué chez soi.
J’ai
à la fois le regard de peintre, de sculpteur, mais aussi celui d’un chercheur,
de l’ichtyologue, de l’entomologue, du chasseur. La pratique me permet de
recenser de nombreuses notions et un savoir beaucoup plus large que le registre
que l’on attribue au pêcheur. À mon sens, ces enquêtes de terrain, à la façon
dont Tim Ingold travaille, sont une source majeure pour enclencher un processus
de réflexion. Dans cette configuration, je me suis retrouvé à fabriquer des
leurres dans la volonté de pouvoir tromper le poisson, et cette question se
rapporte à mon sens à de l’animisme. Incarner cet objet dans le but de simuler,
le mettre en action, animer une mimétique pour attraper un poisson pour le
pêcheur. À l’inverse, le poisson perçoit réellement un poisson, et celui-ci
l’attaque afin de pouvoir s’en alimenter. La vision de l’homme comme celle du
poisson donnent une présence à cet objet, un rôle, et même une vie.
Rêver à la façon dont rêvent les chasseurs, c’est devenir la bête que l’on chasse et voir les choses comme elle les voit. C’est s’ouvrir à de nouvelles possibilités d’être et non de rechercher une fermeture.
Bonche
Loïc est inscrit en doctorat d’Étude et Pratique des arts sous la direction de
Christine Major (Université du Québec à Montréal) et Romain Mathieu (École
Supérieur d'art et Design de Saint-Étienne). Diplômé en 2021 à l’École
Supérieur d'Art et Design de Saint-Étienne en Art, sa pratique artistique
gravite autour de tout ce qui relève de l’intelligence spécifique de la main.
Ses recherches sont ouvertes à la fois sur le monde et sur les cultures
locales. En passant par les métiers d’art, d'artistes, et de fabrications
domestiques. Il décloisonne les pratiques de la main par le faire et participe
au programme recherche européen Arts and Crafts aujourd’hui au sein du Laboratoire d’Expérimentation des Modernités.
www.instagram.com/loic_bonche
L’Assaut
de la menuiserie, lieu d’art contemporain
11
rue Bourgneuf 42000 Saint-Étienne
Ouverture
Du mercredi 14 au samedi 17 décembre 2022
Mercredi,
jeudi, vendredi : ouverture de 15h à 19h30
Samedi
: 10h à 18h