Labo d’Objet développe un programme de recherche « Objet-centré » qui concerne les conditions de possibilité, aujourd’hui, d’un design d’objet. L’équipe constatant que l’objet, représentant de la création industrielle et symbole de ses contradictions, se trouve désormais pris dans une aporie, s’est engagée dans une interrogation radicale de l’objet-à venir.
Le design ne s’émancipe pas des conditions de production des
objets, définitivement associés au coût écologique (encombrement du monde, consomption
des ressources fossiles, pollutions plastiques et polluants éternels) et aux
manquements éthiques (conditions de travail, manipulation des désirs). Comment,
dans ces conditions, retrouver une motivation esthétique et une légitimité
théorique au design d’objet, en particulier face aux designers en formation
dans les écoles ?
Les recherches du Labo d’Objet rompent avec les descripteurs habituels
des objets (forme, fonction, matière, techniques, usage) qui enferment le
design dans la triple rationalité de l’usage, de la sobriété et de la
matérialisation/dématérialisation, sans mener vers une esthétique à même
de renouveler une culture matérielle.
Labo d’Objet s’écarte
délibérément des sentiers battus et explore le hors-piste de l’objet, en jouant
sur des décalages stimulants pour l’intelligence et la sensibilité. Il
prospecte en direction des mutations sensorielles des objets et des matériaux,
des impacts du signe et du narratif sur les formes, de l’omniprésence des
archétypes, du retrait des usages, de l’existence dans des contextes
inhospitaliers, des statuts de la production, et des rapports de l’imagination
au réel et de l’impact des objets sur le savoir. Labo d’Objet cultive
une vision parallèle pour spéculer sur les possibilités de création et de
transformation, en se concentrant sur les idées souvent ignorées ou
marginalisées.
Un premier thème acte un principe de recherche sur le design, la recherche par l’objet, et explore une esthétique expérimentale.
Standards
Il s’agit de créer des collections d’images ou de
maquettes, qui poussent à leur paroxysme des caractéristiques descriptives
en apparence classiques (le type et le standard, l’apparence formelle et la
couleur) tout en introduisant des descripteurs plus inattendus (les mécaniques
et les cinétiques, les scénarios fictionnels). Ces collections sont l’objet
d’analyses spéculatives qui évaluent les possibilités de création d’objets et
de pistes nouvelles pour la création industrielle, ses conditions de possibilité,
une esthétique renouvelée.
Pure design
Pour cela il se concentre sur une recherche de « pureté », une
méthode de design qui se concentre sur un essentiel, pure-design, recherche
d’une harmonie qui serait constante quels que soient les milieux et les
finalités de la création et qui implique une exploration libre d’un
imaginaire des matières et des formes.
Le design de mouvement : la chaîne
cinématique de l’objet en mobilité
Il est frappant que la cinétique semble une qualité additionnelle
et secondaire étudiée a posteriori. Labo d’Objet met au premier plan
le design de mouvement. Il ouvre un champ sur le design de mouvements et
s’intéresse à l’analyse de la chaîne cinématique, cinétique et à l’utilisation
des objets en mobilité. Il inclut l’étude des déplacements, transformations,
articulations et ouvertures des objets, ainsi que leurs aspects ergonomiques,
mécaniques et esthétiques. Il étudie les technologies de mobilité ancienne et
future et leur impact sur les usages, les formes et leur perception.
Un second thème étudie l’impact de cette pratique expérimentale
sur l’activité même de conception. Les designers et leur pratique sont au cœur
du processus méthodologique. Les projets constituent des espaces de recherche
narrative (fictionnelle, utopique, dystopique). Labo d’Objet s’attache
à décrire les activités de réflexion et de production qui nourrissent le
travail individuel ou plus collectif et s’interroge sur les codes d’une
esthétique et d’une narrativité des objets. La création de collections est
observée, documentée et discutée, ainsi que sa rétroaction sur les pratiques de
création au sein de l’école, et dans un cadre de recherche qui comprend
l’action pédagogique (master, post-diplôme).
Cela pose les bases d’un design d’objet du futur. On postule que
celui-ci imagine et crée des objets issus de l’expérience subjective du
monde, en considérant les incertitudes et les incohérences du futur.
Cette recherche explore l’avenir en matérialisant des scénarios fictionnels
pour les mettre en débat. Elle reprend des étapes clés inspirées des méthodes
de la prospective et de l’anticipation, telles que l’analyse de l’avenir, la
simulation de scénarios, l’analyse du moment présent, l’identification de signaux
faibles et naissants.
Labo d’Objet s’attache à une troisième perspective, nommée « design sur-narratif », au sens où la conception et la forme des objets sont approchées par la narration, le récit et la thématisation. On s’intéresse ici aux pratiques de narration excessive à des fins formelles. Cette recherche intègre des structures narratives variées telles que l'hypertexte, le cinéma interactif et le récit non linéaire, et toutes les recherches narratives développées pour les environnements virtualisés et immersifs, et où l’objet incorpore une agentivité d’effets performatifs et magiques qui sont potentiellement des indications sur le devenir de l’objet et des modalités de sa conception.
Le programme 2023-2025 consiste en un séminaire de recherche qui organise la discussion scientifique sur les collections d’images et de maquettes ainsi que sur les scénarios produits par les membres de l’équipe de recherche, parfois avec les étudiants. Indépendamment des participations aux colloques et publications qui concernent les thématiques du laboratoire Objet, l’aboutissement de ce programme de deux ans consiste en un numéro d’Azimuts dédié aux réflexions sur l’objet du futur.
Kiti Brytkova,
étudiante-chercheuse en DSRD 2
Jean-François Dingjian, designer, professeur à l’Esadse
Rodolphe Dogniaux, designer, professeur à l’Esadse
Elen Gavillet, designer, professeur à l’Esadse
Grégory Granados, designer, professeur à l’Esadse
Christophe Marx, designer, professeur à l’Esadse
Marie-Aurore Stiker-Metral, designer, professeur à l’Esadse
Contact
laboratoire.objet@esadse.fr
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