Le rite de passage désigne l’ensemble de phases de tout changement, que ce soit individuel, ou social. Dans le livre Les Rites de Passage (Arnold Van Gennep, 1909) le terme « liminarité » renvoie à l’une des phases des rites de passage. Située entre les séquences cérémonielles de la phase préliminaire, phase de séparation où l’individu est disjoint de son environnement et de la phase post-liminaire, phase d’agrégation, où l’individu est réintégré dans son environnement avec un nouveau statut ou identité. La liminarité représente la phase de transition de deux territoires, l’un connu et l’autre inconnu. Dans cet état intermédiaire, nos repères changent : il se met en place les processus de déstructuration des valeurs et de l’identité, mais aussi d’ouverture et de transformation de l’individu : une chenille et sa chrysalide. Cette zone neutre se renvoie à tous les stades de guérisons, de développements et de croissances. Ce limbe permet de créer un micro-espace qui montre une reconstruction de repère social, politique, et spirituel, de centre de gravité. Ainsi le corps transcende le territoire. L’espace devient la trace du corps, un mouvement inachevé d’une disparition à une autre. Au même niveau qu’un carnet de bord, le corps en mouvement marque sa ligne d’univers, voyageant à travers l’espace. Une ligne comme une séquence de point, trajectoire du corps en mouvement. Une succession de métamorphose laissant une multitude de mues derrière qui aboutira à l’édification d’un imago, le stade final d’un individu - un corps différent, mais toujours l’image de nous. Il n’y a toujours rien de plus et il y a encore quelque chose.
« C’est en partant à l’inconnu, de l’étrangeté, que je veux créer et c’est à l’inconnu que je veux arriver. En tant que chose ou objet, ça peut accéder à une réalité non logique. C’est quelque chose et ce n’est rien. » – Eva Hesse (1936-1970)
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