Le cut-up de William Burroughs met-il en exergue le vide/bide de l'écriture ou lui donne-t-il du corps ?
L'axe principal de ma réflexion s'oriente sur la question du sens, de sa corporalité et de sa mise en crise via le collage. La littérature burroughsienne consiste à écrire en récupérant et réagençant des textes issus de sources différentes. Cette composition hétérogène produit une lecture saccadée, où la rencontre d'incommensurables génère une dislocation du sens qui s'échappe toujours vers son dehors et nous apparaît inexistant. Ce constat mis en lumière par les réflexions d'Anne Cauquelin dans son ouvrage Fréquenter les incorporels fait apparaître une réponse, qui est à la base de mon travail, par l'analyse de la pensée stoïcienne et de ces deux phrases : « Il y a quatre incorporels : le temps, le lieu, le vide et l'exprimable » et « Tout est corps ». Si le sens est le pont entre le mot et la chose, qu'il est un espace palpable ; alors le collage lui donne toute sa corporalité puisqu'il le met en crise continuellement.
D'après ses investigations liées au collage dans la littérature, je retourne vers les formes plastiques et explore différents processus de collage. Camoufler, engluer, clipser, enclencher sont des gestes qui me permettent alors de contraindre des fusions de matériaux, de signes, de cultures et d'histoires pour offrir une expérience palpable du « faire sens ».