Mon projet de diplôme se base sur une croyance, sans doute absurde et utopiste, (et tant mieux) que la matière ne serait qu'en dormance, en attente d'être réveillée. Elle contiendrait déjà en elle tout le potentiel sensible d'une oeuvre, et il ne s'agirait que de la travailler, au corps, pour la révéler.
En la changeant de sa fonction première, en la malmenant, en la mettant en tension, à la limite de la déchirure, à la limite de la disparition. Mais aussi en en prenant soin, par le geste répété de l'artisan, du maçon, qui accentue ses moindres aspects, la polie.
Cette matière choisie est celle qui s'assemble, s'agglomère, s'expand à l'infinie par couches successives. Celle qui peut être extrêmement fine, de l'ordre du macron, ténue, à la limite de l'imperceptible.
Elle se transforme. Liquide elle devient solide, se fige sur la surface appliquée, l'épouse, adhère ou alors la repousse. Une matière qui lutte en somme, contre un support, dans un espace.
Ce choix se fait dans un vaste va et vient entre l'attrait sensible pour la matière elle-même, sa malléabilité, mais aussi pour son rapport conceptuel qui en découle. A partir de quel instant quelque chose se met-elle à exister ? Dans toute la lutte, et la fragilité qu'une existence demande, oscillant entre le rejet et l'absorption, la mienne se fait dans l'infra-mince, par couches successives, en toute discrétion. Dans le silence de la matière stratifiée, elle se met a vibrer en elle-même, dans l'espace où elle prend place, et avec le support, vecteur de son apparition.