Le point de départ pourrait être (est) la bande dessinée. De cette forme - industrielle - culturelle, on ne retiendra pas le statut d'art populaire qu'il faudrait revaloriser en la passant dans le champ de l'art avec un A (à l'image d'un Roy Lichtenstein, ou encore des acteurs de la figuration narrative,...). Et si l'on peut la critiquer dans son acception médiatique, on ne peut que reconnaître l'intérêt de certains des enjeux qu'elle met en place comme médium, proches des questionnements travaillant l'histoire de l'art.
En cela, elle n'est qu'un point de départ, à l'opposé d'une finalité dont participe principalement le dessin. Le dessin en bande dessinée ne se pose pas en tant que graphisme (trait, matière,...), il est plat. Plat contre lequel on ne peut que s'abîmer, surface. Il se dit ligne (souvent claire). Il se veut narratif. Il se veut signe.
Mon travail se pose donc par rapport à cette forme qu'est la bande dessinée par le dessin. Celui-ci d'abord dans un geste. D'un travail imprimé dont le support est l'album, je décalque certains éléments contenus dans les cases (lignes du décor le plus souvent). Redessinant un dessin, je deviens dessinateur du seul geste, sans arrière pensée formelle ou liée à un sujet, me constituant au fil des copies un répertoire. De ce répertoire enflant au fil des dessins et du temps s'élabore alors à partir de contraintes liées au hasard (sélection, composition,...) des ensembles dessinés qui constituent l'objet même de mon travail. Composant ainsi un certain nombre de dessins dont la finalité est l'impression, numérique dans un premier temps, photocopie dans un second, afin de revenir à ce plat, à cette surface plane qui favorise (peut-être) l'accès à quelque chose de l'ordre de l'image.
C'est ensuite dans la multiplicité des « projections » possibles que se poursuit cette exploration de la ligne dessinée. Se rapportant rapidement à la question de l'écriture, en ce qu'elle est tentative de rendre visible une pensée en train de se faire, de la rendre graphiquement signifiante, lisible, les différents supports tendent à rendre intelligible ce mouvement. Il y a donc dans un premier temps le passage au mur, en terme d'exposition, qui se donne alors comme cartographie de l'ensemble, plan en construction, carte au sein de laquelle le lisible se confronte au regard. Ce premier moment se veut de l'ordre d'une variation : ce sont les différentes voies d'accrochage qui permettent d'exploiter différentes séquences de regard et ainsi d'explorer des propositions de lecture diverses. Dans un second temps vient une édition. Dans celle-ci présentation des dessins accompagnés d'un texte. Ce texte tente de donner à lire les images en les investissant narrativement, afin de les donner cette fois non plus à regarder mais à lire.