Nous sommes trois commissaires, trois chercheuses : Penny Sparke, Jana Scholze et Catharine Rossi. Nous travaillons pour la Kingston University à Londres.
La pandémie de Covid a mis en évidence les défis urgents que le design doit relever en matière d’habitat. Pour citer ceux qui nous paraissent les plus importants : l’inégalité d’accès au logement, l’emprise de la marchandisation dans la construction de nos identités, notre séparation d’avec la nature, les menaces qui pèsent sur notre environnement, notre santé et notre bien-être, les dangers liés à l’expansion des technologies de surveillance et la perte du sentiment de communauté.
Sur tous ces sujets, les designers proposent des bifurcations ; l’exposition At Home les explore en cinq parties : l'utopie, le refuge, le concept d'identité, la notion de bien-être et en conclusion, ce qui est « connecté » et les questions que cela soulève.
Une des premières choses que l'on voit en entrant dans l'exposition est un film de Martha Rosler. Avec ce film d'animation, intitulé Housing is a Human Right (le logement est un droit pour l'Homme), il est fondamentalement question de la dimension politique de la maison.
La partie Identité de l’exposition traite de la manière dont nous construisons nos identités à travers les objets présents dans nos maisons, mais aussi de la manière dont les objets peuvent nous façonner. Il y a plusieurs façons d’aborder l’identité, en particulier l’identité de genre.
Pour aborder ce sujet, nous avons sélectionné un aspirateur conçu par un groupe qui s’appelle Edit. C'est un aspirateur qui n’est pas fonctionnel de manière conventionnelle. En fait, il est conçu pour faire la critique du design lié aux tâches ménagères qui reviennent souvent aux femmes.
Il ne s'agit pas ici d'un objet exposé : le Parklet fait partie du design de l'exposition. C’est un projet conçu par le studio de design d'exposition Plaid qui a conçu la scénographie de At Home.
Les parklets sont une innovation apparue ces dernières années : c’est essentiellement la transformation d'une place de parking en parc miniature. Et notre installation fait bien la dimension d'une place de parking !
Nous nous sommes intéressées à ce concept en l’abordant par le biais de la crise COVID qui nous a fait prendre conscience de l'importance des espaces partagés dans nos quartiers, ainsi que des espaces nous permettant d'entrer en contact avec la nature au sein de la ville.
Nous avons choisi de conclure l’exposition avec le film Planet City. C'est un film du designer et architecte Liam Young qui partage son temps entre Londres et les États-Unis. Liam Young tente de faire une suggestion, qui s'avère être très provocatrice. Son film Planet City propose en fait que la population mondiale au complet vive dans une seule et même ville, une sorte de mégacité. Ainsi la nature pourrait se régénérer et guérir.
Cela peut bien sûr être compris par beaucoup comme une vision très dystopique du monde : « Cela nous arrivera-t-il un jour ? Allons-nous devoir vivre dans un espace surpeuplé ? » Cependant, ce n'est pas forcément ce que Liam Young suggère.
Pour nous, ce film résume en sorte toutes les questions posées par cette exposition : qui choisit à quoi va ressembler notre futur ? Quelles sont les valeurs qui sous-tendent les questionnements sur notre manière de vivre et de vivre ensemble ? Comment voulons-nous créer des esprits de quartier, et définir la relation nouée entre l'humain et le non-humain ?