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Arts and Crafts 

1880–1920 

Par Dufour Lisa

William Morris - Papier peint artichaut vers 1900 © domaine public

Josef Hoffmann. Modernisation et moralisation des formes dans la sécession viennoise, 1904-1906

Les origines du design s’ancrent dans la révolution industrielle et l’explosion de la production de biens : ce triomphe de l’industrie porte alors l’espérance d’une démocratisation du confort, de l’amélioration des conditions de vie des plus défavorisés, et de l’émergence d’une société à la fois plus riche et plus égalitaire.

Pourtant, on constate rapidement qu’en l’absence d’une réflexion profonde sur les formes de cette production, celle-ci continue d’emprunter au passé et à la tradition, dans une sorte de pastiche généralisé, ses codes esthétiques, construisant un paysage éclectique d’objets chargés d’ornements, en totale contradiction avec leur fabrication ou les matériaux modernes qui les composent.

Le mouvement Arts and Crafts, né en Angleterre et emmené par William Morris, se pose en réaction contre ce phénomène de « trahison » de l’industrie, rappelant que la production d’objets doit s’inscrire dans une vision plus vaste de la société, soucieuse du progrès social et de l’élévation de l’homme.

Le design, dans cette perspective, est investi d’une fonction politique et porte une responsabilité non seulement esthétique, mais aussi, et à travers elle, une responsabilité éthique. C’est l’alliance de l’art et des arts décoratifs (plus tard, de l’art et de l’industrie) qui a pour vocation de tracer cette nouvelle voie, et de matérialiser le bonheur social.

Ces théories ont une influence considérable sur tous les courants de rénovation des arts décoratifs et d’émergence du design. C’est le cas notamment de la sécession viennoise, ce courant illustré par les créations de Josef Hoffmann présentées ici. On retrouve, dans l’épure géométrique des formes et dans la réduction des attributs ornementaux (la structure des objets elle-même faisant office d’animation esthétique), les principes fondamentaux d’Arts and Crafts : simplicité, lisibilité/vérité de la structure et du matériau, rejet de l’ornement.

La collaboration du designer avec la société Köhn (des collaborations avec Thonet ont également existé) marque le passage des idées d’Arts and Crafts dans la sphère de la production industrielle.

La Sitzmaschine est particulièrement exemplaire de la pensée du mouvement : les formes, très géométriques, ne se laissent aller à aucune exubérance ; la structure du fauteuil est entièrement visible, jusqu’à l’accentuation des points de calage pour les différentes inclinaisons du dossier – les aspects fonctionnels et décoratifs coïncident – ; le rationalisme de l’approche est souligné dans le nom même de l’objet, devenu une simple « machine à s’asseoir », précédant ainsi la nouvelle conception du mobilier développée, ensuite, par Le Corbusier.

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